Déneigement: 12 questions à Alain Dufresne, directeur des travaux publics

Mis à jour le 11 août 2022
Temps de lecture : 4 min

Alain Dufresne s’occupe de la neige depuis son arrivée au service de la voirie et du déneigement de Ville-Marie, il y a 12 ans. C’est dire s’il maîtrise le sujet. Aujourd’hui directeur des travaux publics, il répond aux petites – et grandes – questions que tout le monde se pose.

1. Quelles sont les étapes du déneigement? 

D’abord, on consulte nos bulletins météo très précis, on organise le déploiement des équipes de déneigement et on s’assure de la répartition des employé-e-s et de la préparation des appareils. Ensuite, il y a 3 grandes étapes dans le déneigement: 

  • 1/ D’abord, l’épandage de fondants ou d’abrasifs dès qu’il y a une chute de neige.
  • 2/ Si l’accumulation de neige atteint 2,5 cm, on passe au déblaiement, c’est-à-dire que les fondants et abrasifs ne suffisent plus et qu’il faut pousser la neige avec des équipements dotés de pelle. 
  • 3/ Puis, lors des tempêtes, quand une certaine quantité de neige est atteinte, on procède au chargement de la neige. On déblaie et on dégage les rues, puis on ramasse la neige avec des souffleuses, on la met dans des camions et on s’en débarrasse.

2. Mesure-t-on vraiment les 2,5 cm de neige? 

Oui! Un contremaître effectue une vérification dans un endroit précis de notre cour de voirie en mesurant la couche à la règle… comme dans le bon vieux temps! 

3. Pourquoi n’utilise-t-on plus de sable? 

Non seulement c’était salissant, mais le sable pouvait aussi s’accumuler et faire de la sédimentation dans les égouts. De plus, la petite roche crée une meilleure adhérence sur les trottoirs et peut être plus facilement récupérée lors des nettoyages de printemps pour être ensuite réutilisée. 

4. Où va la neige? 

Au centre-ville, c’est assez compliqué d’éliminer la neige. Une fois le chargement commencé, on a le choix: soit la déposer dans des sites ouverts, mais il faut se rendre assez loin, dans l’arrondissement de LaSalle; soit jeter la neige dans l’une des deux chutes à l’égout de Ville-Marie. Ce sont d’énormes collecteurs qui se trouvent dans le site du Village au Pied-du-Courant et sur la rue Mill.

5. Pourquoi les pistes cyclables sont parfois déneigées avant les trottoirs? 

Les pistes cyclables sont assez larges pour être déneigées à l’aide de camions standards qui roulent plus vite et contiennent de plus grandes réserves de fondants. Elles sont donc souvent faites en même temps que le réseau routier.
Sur les trottoirs, seuls les petits véhicules effectuent le déneigement car l’espace est réduit. Ils doivent rouler moins vite en raison de la présence de piétons et de mobilier urbain (bancs, poteaux, etc.), et leur réserve de fondants étant plus petite, ils doivent s’arrêter plus souvent pour se faire remplir. 

6. Combien de temps durent les opérations de déneigement? 

Tout dépend de la chute de neige, mais il faut environ 8 heures pour dégager l’ensemble des 150 km de rues, des 340 km de trottoirs, des arrêts d’autobus, des entrées de métro… Puis le chargement commence. 

7. Combien y a-t-il de camions à l’œuvre pendant le déneigement? 

Ça peut aller jusqu’à 130: plus de 70 camions pour le déblaiement, et 50 camions-bennes et semi-remorques supplémentaires pendant le chargement 

8. Quelle est la principale difficulté dans le déneigement? 

En 2019, nous avons connu une dizaine d’épisodes de gel-dégel. La normale étant de cinq. Il pleut beaucoup, puis la température tombe à -15°C et une couche de glace de 1,5 po peut rapidement se former. C’est très difficile à récupérer car les fondants agissent moins bien quand il fait aussi froid. L’important, c’est d’agir au bon moment et de ne pas attendre pour mettre du sel et du gravier… quelle que soit l’heure!

9. Qu’est-ce qui peut ralentir les opérations? 

  • La circulation

Ville-Marie étant un arrondissement central, la circulation peut représenter un gros défi. Avec plus de 500 000 visiteuses et visiteurs par jour en vélo, en voiture ou à pied, le trafic est important et la congestion routière aux heures de pointe peut ralentir le travail de déneigement.

  • Les rues étroites

Les rues étroites constituent elles aussi un défi. Quand il y a de grosses bordées de neige, les véhicules mal stationnés empêchent nos machines de passer. L’interdiction de stationner des deux côtés de la rue en même temps accélère beaucoup notre travail et diminue le risque de dommages aux véhicules.

  • Les rues en pente

Les rues en pente représentent également un enjeu propre à notre territoire. Que ce soit près du mont Royal ou entre les rues Sherbrooke Est et Ontario Est, il faut rester très vigilant car elles peuvent rapidement devenir glissantes.

  • Les véhicules remorqués

Par ailleurs, les quelque 600 à 1000 véhicules remorqués par chargement ralentissent beaucoup les opérations.

  • Les bris mécaniques

Enfin, des bris mécaniques peuvent survenir. Quand une souffleuse tombe en panne, il faut la remplacer. Pour d’autres machines, ce n’est pas un problème, les autres prennent le relais. Mais pour la souffleuse, qui est unique sur un parcours, il faut la remplacer et ça peut faire perdre une heure. 

10. Le télétravail risque de compliquer les choses… 

Oui. En télétravail, les gens utilisent moins leur véhicule. Vont-ils penser à surveiller les interdictions de stationner? Ils devront être vigilants. Il y aura aussi moins de places de stationnement. C’est une situation exceptionnelle et nouvelle. On s’ajustera au besoin à la suite de la première neige. 

11. Quelles sont les nouveautés pour la saison 2020-2021? 

On a loué pour le tester un petit véhicule de 42 pouces au lieu de 48 de large qui va être réservé aux trottoirs étroits pour les déblayer plus rapidement. Par ailleurs, la nouvelle rue Sainte-Catherine Ouest, entre la rue De Bleury et le boulevard Robert-Bourassa, bénéficiera d’un entretien particulier afin de permettre l’usage du mobilier, même en période hivernale. Et la portion située dans le Quartier des spectacles, entre la rue De Bleury et le boulevard Saint-Laurent, restera piétonne et sera donc aussi déneigée.

12. Montréal est-elle une référence pour le déneigement? 

J’ai assisté à de nombreux congrès et j’ai beaucoup lu sur le sujet. Montréal est la ville de plus d’un million d’habitants la plus enneigée au monde. Les villes qui reçoivent autant de neige que chez nous sont quatre à cinq fois plus petites. Avec notre population, la complexité de notre territoire (stationnements sur rue, circulation…) et la quantité de neige qu’on reçoit, on est pas mal les champions au monde!

Surveillez les panneaux! 

Pour déneiger plus rapidement les rues, le chargement de la neige s’effectue 24 h/24. Les interdictions de stationner sont de 7 h à 19 h ou de 19 h à 7 h. Les périodes les plus difficiles pour le remorquage sont en début de quart, soit à 7 h ou à 19 h. Beaucoup de gens attendent le dernier moment, lorsque les remorques déclenchent leur sirène, pour déplacer leur véhicule. Respecter la signalisation est très important, car chaque voiture remorquée ralentit le déneigement et augmente ses coûts.

Le saviez-vous? 

La souffleuse est capable d’avaler beaucoup de choses. Des couvercles de puisards, des morceaux de panneaux de signalisation et même des carcasses de vélos. Mais cela peut endommager l’équipement. C’est pour cette raison qu’une patrouille va inspecter les trottoirs et aviser les citoyennes et citoyens d’enlever leur vélo.