11 questions à Marc-André Lamontagne, élagueur

Mis à jour le 15 juillet 2021
Temps de lecture : 4 min

Les hauteurs, ça ne fait pas peur à Marc-André! Suspendu à l’aide d’un câble ou encore, perché au sommet d’une nacelle, l’élagueur effectue la maintenance des arbres qui ornent les parcs et les rues de Ville-Marie.

En quoi consiste ton métier?

Je suis élagueur. Suite aux demandes qui proviennent soit de nos deux inspecteur-ice-s ou directement des citoyen-ne-s, j’effectue la maintenance des arbres dans les rues et les parcs de Ville-Marie. Cela comprend la coupe de branches dangereuses, soit suspendues, trop basses, cassées ou celles qui touchent aux bâtiments, tout comme l’abattage d’arbres malades ou morts. En tout, nous sommes à occuper ce poste à Ville-Marie.

À quoi ressemble ton horaire?

En général, je commence mes journées à 6 h, mais certaines tâches demandent un peu plus de temps d’installation, alors mon travail de coupe peut commencer plus tard. Par exemple, lorsque l’on doit dévier des voies, barrer le trottoir ou poser de la signalisation pour des raisons de sécurité. De plus, on ne peut pas travailler quand il fait noir : on ne verrait rien dans l’arbre, donc l’hiver, c’est moins propice à l’entretien. Ça prend de la clarté, quand on est suspendu dans un câble! L’hiver, on fait plus d’abattages, dû à l’agrile du frêne ou au nouvelles plantations qui n’ont pas survécu. 

Comment vis-tu le travail à 100 % dehors?

J’adore cela, mais il y a des journées plus difficiles. Quand ça brasse dû aux grosses bourrasques de vent, ça peut bouger jusqu’à 6 pieds, en haut dans la cime. On travaille toujours, même lors de tempêtes. Les tâches vont juste diminuer; par exemple, lorsqu’il pleut trop fort, on ne grimpe pas, parce que les câbles vont gonfler un peu et deviennent trop durs avec les nœuds imbibés. Ce n’est pas sécuritaire non plus, car les bottes glissent. On effectue alors des petits abattages ou des tailles de formation, c’est-à-dire donner une structure aux nouvelles plantations. 

Depuis combien de temps es-tu élagueur?

Depuis 12 ans. J’ai d’abord travaillé pour une compagnie privée sur la Rive-Sud. J’ai quitté à cause des longues périodes de chômage. Je suis à Ville-Marie depuis sept ans et je ne regrette pas mon choix : c’est énergique et il n’y a pas une place pareille. J’étais très attiré par la nature aussi, j’ai grandi dans la forêt de Chibougamau. C’est dans mon sang!

Qu’aimes-tu le plus dans ton travail?

Le fait que tous les arbres soient différents (essence, branche, inclinaison, problématique) fait en sorte qu’on a beau avoir un plan et une méthode de travail, tout peut changer en cours de route. Par exemple, on ne coupe pas les mélèzes de la même façon que les érables. Tout cela pousse à réfléchir et à nous surpasser. C’est comme un gros casse-tête! 

Dans quelle situation un arbre est-il considéré « dangereux »?

Ça peut être au niveau de la position des branches, mais une fourche faible est aussi très problématique. C’est comme si deux arbres poussaient dans un, ce qui crée de la compétition. Au final, ça peut amener de la pourriture dans le centre des branches, puis la plus faible des deux va finir par tomber. On retrouve cette problématique particulièrement dans les érables de Norvège. Sinon, les érables Giguère poussent sur le côté des bâtiments, ce qui donne du fil à retordre, surtout à cause des racines. Finalement, les ormes chinois sont des arbres dont les branches se cassent très facilement. Voilà quelques exemples que l’on voit fréquemment à Montréal.

Comment reconnaît-on un arbre malade?

Il y a des branches mortes dans la cime et des champignons dans les marques d’anciennes coupes, ou sinon, l’écorce se décolle. Ce sont des signes auxquels on doit porter attention. 

Tu me sembles très connaisseur des arbres?

Oh oui, je suis vraiment « pas pire »! Pour devenir élagueur à la Ville, ça prend un diplôme d’études professionnelles en arboriculture-élagage. Je me rappelle de mon premier examen, qui demandait de reconnaître les bourgeons, les types d’écorces, l’essence des arbres, les feuilles. À la longue, je suis devenu très calé en la matière.

Y a-t-il une anecdote marquante que tu peux nous conter?

Sur le mont Royal, il y a deux ans, je devais dégager les pistes de ski de fond. Alors que je m’apprêtais à faire mon travail, une chouette s’est mise à me crier dessus… J’ai tellement fait le saut que je l’ai laissée là, dans son arbre! De plus, je me suis souvent fait attaquer par des écureuils et piquer par des guêpes. Disons que je préfère la flore à la faune!

Quel est ton contact général avec la population?

En général, les gens ont beaucoup de curiosité, ils veulent savoir ce qu’on fait. Mais il arrive que l’on passe pour des « assassins de la nature », surtout quand on coupe un arbre. On se fait traiter de tous les noms, mais au fond, c’est dû à un manque de connaissance de notre métier. L’élagage, c’est d’abord l’entretien des arbres et ça comprend l’abattage. On ne coupe pas des arbres sans raison, c’est toujours pour le bien de l’arbre ou de la population. Ton arbre, il a beau avoir une allure saine et de belles feuilles, mais s’il a des problèmes de fourches ou de la pourriture à l’intérieur, il est extrêmement dangereux. On doit souvent prendre le temps de l’expliquer.

 Pourquoi les gens devraient-ils connaître ton métier?

Je trouve important que les gens sachent l’importance d’entretenir un arbre, avec tout ce que ça comprend. Avant de s’emporter ou de nous insulter, prenez le temps de vous questionner sur ce que l’on fait. J’aimerais ajouter qu’en principe, pour tout arbre abattu, un autre est planté. On est là pour l’environnement et, nous aussi, on tient au poumon de notre planète.