Salomé Élibert, une femme engagée pour l’Est de Montréal
Dans le cadre du Mois de l’histoire des Noirs, nous vous présentons une entrevue avec Salomé Élibert, directrice générale de Parcours ÂME, un organisme qui a pour mission de donner vie aux quartiers de l’Est de Montréal par le biais de projets en art visuel et en transition écologique.
Bonjour Salomé! Pourrais-tu nous parler de ton cheminement professionnel?
Je suis une fille de l’Est donc c’est vraiment un coin qui me tient à cœur. C’est l’Est qui a façonné la personne que je suis devenue, qui m’inspire à faire beaucoup de choses et me pousse à aller plus loin.
J’ai grandi avec deux frères et une sœur et des parents d’origine haïtienne pour qui l’éducation et l’implication sociale étaient très importants.
Au Cégep, j’étais impliquée dans plusieurs associations. Je ne voulais pas changer le monde, mais je voulais plutôt voir de quelle façon je pouvais apporter une certaine contribution à la société. Très rapidement, j’ai intégré l’une des premières brigades de coopération internationale à organiser des stages au Nicaragua pendant tout l’été. Ça m’a donné le désir de vouloir en faire plus.
À l’université, je me suis impliquée au sein de l’Association Haïtienne de l’Université de Montréal où j’ai organisé des débats publics sur différents sujets qui touchent la société et des expositions sur la culture haïtienne.
À l’âge adulte, mon engagement s’est poursuivi au sein du conseil d’administration de la Jeune chambre de commerce Haïtienne pendant plusieurs années où je travaillais à faire reconnaître le talent des jeunes communautés noires. Nos parents, quand ils ont immigré ici ont fait tellement de sacrifices pour nous et nous ont pavé la voie, c’est ensuite à nous de tracer le chemin.
Mon dernier engagement avant d’arriver à Parcours Âme était au sein du conseil d’administration de la Fondation Kanpe, un organisme qui vise à sortir de la pauvreté les communautés vulnérables du Plateau central en Haïti.
Quand es-tu arrivée à Parcours ÂME?
Dès 2012, je suis revenue m’impliquer dans mon quartier. Je voyais qu’il y avait des choses à faire pour améliorer la propreté, l’esthétique, car je trouvais que l’environnement se détériorait. Il y avait peu de projets d’embellissement qui se faisaient dans l’Est et c’est là que l’idée de Parcours ÂME a germé.
Nous sommes allés à la rencontre des tables de quartiers pour sonder l’intérêt des organismes communautaires à savoir s’ils étaient intéressés à devenir de potentiels partenaires et collaborateurs. C’est lors de notre participation au concours l’Est innove et au budget participatif de l’arrondissement MHM où nous avions déposé un projet que cela a commencé à prendre forme.
C’est seulement en 2021 que tout a été officialisé et que nous avons fondé l’organisme. Nous n’avons pas d’équipe de permanence, mais des bénévoles. On a reçu dernièrement une subvention du gouvernement du Canada, grâce au Groupe 3737, pour le renforcement de nos capacités via une initiative pour appuyer les membres de la communauté noire. J’ai maintenant une personne pour m’accompagner dans les démarches de financement et dans la planification budgétaire des projets. La subvention nous permettra aussi de travailler sur nos communications, dont notre site web.
Je marchais le quartier chaque jour et je réfléchissais aux moyens à prendre pour transformer le quartier et développer un sentiment d’appartenance et de fierté. Le parcours, c’est n’est pas juste au niveau de l’art, mais c’est un parcours de biodiversité pour créer des moments de détente et de contemplation et favoriser la mobilité active.
Où est située votre première murale?
On a réalisé notre première murale qui s’appelle Dame Justice dans les HLM Dupéré. Un travail de médiation culturelle a été fait en collaboration avec les résidents qui ont déterminé les thèmes qui étaient importants pour eux, soit la justice, l’environnement, l’intergénérationnalité et l’équité. On a organisé un grand BBQ pour expliquer le projet, puis nous avons collaboré avec MU pour la création de la murale. C’est l’artiste Omar Bernal qui l’a réalisée.
Pour les autres murales sur De Grosbois, réalisées par l’artiste Borrris, la démarche a été complètement différente. Cela demande beaucoup de vulgarisation et d’éducation parce que ce n’est pas quelque chose que les gens ont l’habitude de voir. Ce n’est pas comme sur Le Plateau où il y a beaucoup de propriétaires qui offrent leur mur. C’est notre plus gros défi au nord de Sherbrooke, là où se concentrent en grande partie nos actions.
Qui sont vos bénévoles?
Nous avons la chance de compter parmi nos bénévoles des urbanistes, des designers et des technologues en architecture qui assistent à la planification. Nous avons aussi des bénévoles ponctuels pour certains événements. Ce sont des photographes, de jeunes étudiants qui viennent d’un peu partout, des aîné.e.s et des gens du Chez-Nous de Mercier-Est. Notre objectif est d’avoir une permanence d’ici quelques années.
Au début, on a fait des partenariats avec MU et Artgang. On prend doucement notre indépendance tout en gardant ces liens de collaborations avec les partenaires.
L’idée derrière Parcours ÂME est de poser des actions artistiques et vertes pour qu’on sente que le secteur situé au nord du métro Honoré-Beaugrand jusqu’à Carlos-D’Alcantara se transforme et devienne le pôle culturel de Mercier-Est.
Et pour le volet horticulture? Comment procédez-vous?
Le premier projet de verdissement a été une belle collaboration avec l’arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. J’avais soumis un plan à l’équipe de la transition écologique et certains sites ont été sélectionnés par l’arrondissement.
Nous sommes prêts à déposer nos projets pour obtenir du financement. Un des grands projets phares qu’on veut offrir à la population est celui des bicyclettes fleuries. Il vise à transformer d’anciens vélos en œuvres d’art temporelles avec la collaboration de différents groupes communautaires dont des familles, des jeunes et des aîné.e.s. Ces vélos seront exposés dans le parcours.
Quels sont les objectifs de Parcours ÂME pour les prochaines années?
C’est de changer le paradigme de ce coin de l’Est pour le redéfinir comme un parcours vert. Nous aimerions aussi réaliser une centaine d’actions artistiques et au-delà de 200 actions de verdissement. On a fait un inventaire potentiel des murs et des sites de transformation.
Il faut réduire toutes les barrières possibles pour que les gens soient appelés à marcher et à sortir dehors. Quand on sait que l’environnement est agréable, cela devient plus facile. À travers le parcours, l’idée c’est de créer une expérience et de l’animer avec différentes activités culturelles, sociales ou sportives.
L’an dernier, nous avons créé notre premier événement appelé MURS-MUS dont l’idée est de faire parler les murs par l’art vivant et de permettre aux gens de découvrir le corridor que l’on est en train de construire. L’activité se terminait par une grande fête qui rassemblait plusieurs acteurs de la transition écologique.
Nous avons aussi un projet qui s’appelle Vox Planète qui vise à donner une plateforme à 75 jeunes de l’est pour s’exprimer sur les enjeux environnementaux. C’est une semaine avec une délégation de la France qui s’appelle Eloquentia. Ça se termine par un concours de plaidoiries pendant la semaine de relâche. Le projet est à l’étape de la recherche de subventions. C’est quelque chose qui manque dans le cursus scolaire. Cela mène à une certaine confiance et aide les jeunes à structurer leurs idées. Cela peut mener à de très belles carrières.
Nous avons également réalisé le projet ÂME de mon quartier. La première édition a été un franc succès et a eu un impact très positif sur les participant.e.s. On a répondu récemment à l’appel à projet d’AIRE OUVERTE et l’idée serait d’offrir ces ateliers, de façon encore plus approfondie que la première édition, pour les jeunes vulnérable en version art thérapie. Ceux-ci se concluraient en exposition dans un espace intérieur et par la suite, en un tournée itinérante à travers les quartiers de l’Est. Si on obtient la subvention, cela nous permettrait d’amplifier l’impact et de le faire bénéficier à plus de jeunes.
Les petits dîners & soupers d’ÂME
J’adore cuisiner! J’ai aussi un autre projet en tête : les petits dîners et soupers d’ÂME. L’idée, c’est de rassembler les citoyen.ne.s pour qu’ils et elles se rencontrent autour d’un bon repas. Cette activité serait organisée en collaboration avec les commerçant.e.s locaux.
C’est un projet de connectivité sociale et de promotion du commerce local de l’Est, dans une perspective de développement durable et mobilité active, où les citoyens organisent entre eux un repas partagé entre voisins avec des moments d’échanges sur divers thématiques, dont la consommation et l’approvisionnement des denrées, accessoires de table et objets de décor sont encouragés à se faire à l’intérieur d’un circuit court et de façon active.
Quand on sent qu’on sent qu’on fait quelque chose qu’on aime, auquel on croit et qu’il y a un impact réel, cela n’a pas de prix. Tu te lèves le matin et tu as envie de faire avancer tes dossiers.
Comme on peut le constater, Salomé a des idées plein la tête pour son quartier. Mercier-Est a bien de la chance de compter sur une femme aussi inspirante et déterminée.
Merci pour cette belle rencontre Salomé et bonne chance dans tous tes beaux projets!
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